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Sam Vimes

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Jan 30, 2002
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Etant en train de regarder les films (bon pas juste là, mais en ce moment) je me demandais quelle est la part d'historique et la part d'invention (que ce soit dans les bouquins et les films). Ce qui m'intéresse le plus est la réalité de la "guerre" entre Robert d'Artois et Mahaut et les conséquences qu'elle put avoir (empoisonnement et meurtre de je ne sais combien de personnes royales, déclenchement de la GCA...).

Autre question: Philippe V le long est-il le digne héritier de son père tel que présenté dans le livre ou le film?
 
Originally posted by Sam Vimes
Etant en train de regarder les films (bon pas juste là, mais en ce moment) je me demandais quelle est la part d'historique et la part d'invention (que ce soit dans les bouquins et les films). Ce qui m'intéresse le plus est la réalité de la "guerre" entre Robert d'Artois et Mahaut et les conséquences qu'elle put avoir (empoisonnement et meurtre de je ne sais combien de personnes royales, déclenchement de la GCA...).

Autre question: Philippe V le long est-il le digne héritier de son père tel que présenté dans le livre ou le film?

J'ai lu les bouquins il y a quelques années, et j'ai vu la vidéo des feuilletons cet été. C'est une des oeuvres que j'ai le plus aimé lire. Je pense que l'on peut la recommander. Mais niveau historicité l'auteur a sûrement pris énormément de liberté avec. Notamment quand il donne l'impression que c'est Robert d'Artois qui a poussé Edouard d'Angleterre à démarrer la guerre contre la France.
 
Pour tes questions : l'affaire d'Artois a empoisonné le Royaume, mais de là à le faire en pratique pour divers princes, c'est une autre histoire... Invention, mais bon, après tout Druon a peut-être tapé juste mais rien ne le prouvera.
Robert d'Artois a contribué à renforcer les prétentions d'Edouard (un grand personnage qui se rallie à un prétendant a toujours son intérêt), mais rien de plus.

Pour Philippe V, difficile à dire. Contrairement à ce que laisse entendre Druon, ce n'est pas un nouveau Philippe le Bel qui aurait connu "6 années de sort contraire". Le prince a été très habile pour sa succession, a poursuivi quelque peu l'oeuvre de son papa (inaliénabilité du domaine royale affirmée - même si ce ne sera pas encore effectif comme à l'époque moderne ; nouvelles dévaluations de la monnaie) mais, s'il paraît plus charismatique que ses frères, on n'en sait pas beaucoup plus.
Je rappelle d'ailleurs, pour la 200e fois, que Philippe le Bel lui-même est présenté par Druon selon un point de vue qui n'est pas universellement accepté : plusieurs le voient comme un personnage un peu fallot, dominé par les grandes personnalités que furent Flotte, Nogaret et Marigny.
Druon a choisi un angle d'attaque (les rois centralisateurs sont des braves types qui ne pensent qu'à l'intérêt de leurs états, les grands barons sont des pourritures), et s'y tient vaille que vaille. Il faut toujours s'en souvenir. ;)
 
pour la substition, il est est intimement convaincu (il me l'a personnellement confirmé) mais c'est largement douteux et y a aucune preuve ... vive l'ADN ... :(
 
Originally posted by Louvois
pour la substition, il est est intimement convaincu (il me l'a personnellement confirmé) mais c'est largement douteux et y a aucune preuve ... vive l'ADN ... :(

ça c'est sur que la substitution c'est un des points les plus faibles du bouquin... un délire de romancier.
 
Originally posted by boultan
Pour moi le gros point faible c'est l'histoire cucul entre le neveu du banquier italien et la coucourde de province...

bof, c'est le coté romantique/romancé
 
Boultan touche quelque chose que j'ai déjà évoqué dans un autre fil: la faiblesse générale des personnages féminins dans l'oeuvre. La transformation d'Isabelle en Femme-forte-donc-masculine-parce-que-frigide en monument de pâmoison falote dès lors qu'elle se retrouve dans le lit de Mortimer n'en est qu'une des illustrations.
 
Originally posted by Oexmelin
Boultan touche quelque chose que j'ai déjà évoqué dans un autre fil: la faiblesse générale des personnages féminins dans l'oeuvre. La transformation d'Isabelle en Femme-forte-donc-masculine-parce-que-frigide en monument de pâmoison falote dès lors qu'elle se retrouve dans le lit de Mortimer n'en est qu'une des illustrations.

Et la mère de la reine Clémence?

Et la mère de Marie de Crécay?

Et Agnès de Bourgogne?

Et la reine Jeanne de Bourgogne?

Et la femme de Hugh le Despenser?

Les personnages féminins forts sont là, seulement elles sont des figures secondaires ou des faire-valoirs.

D.
 
Originally posted by Drakken
Les personnages féminins forts sont là, seulement elles sont des figures secondaires ou des faire-valoirs.

D.

Justement, l'idée d'Oexmelin lors de sa 1ère intervention sur le sujet était que les femmes étaient soit oies blanches, soit dures à l'extrême et de comportement masculin, sans nuance. ;)
Les personnages que tu cites sont tout à fait dans cette deuxième catégorie.
 
Originally posted by Sire Philippe
Justement, l'idée d'Oexmelin lors de sa 1ère intervention sur le sujet était que les femmes étaient soit oies blanches, soit dures à l'extrême et de comportement masculin, sans nuance. ;)
Les personnages que tu cites sont tout à fait dans cette deuxième catégorie.

N'est-ce pas logique au Moyen-âge? Les femmes fortes devaient être "femmes" ou imiter les hommes? Ce n'est pas Wall Street en 1987 après le féminisme, c'est le 14ème siècle avec les femmes dépouvues d'influence, même d'une personalité légale égalitaire. Les femmes fortes n'avaient que les hommes comme modèle, mais elles se laissaient sûrement quand même aller à une féminité faiblarde qui leur avait été inculquée depuis l'enfance.

Je ne vois pas où est le manque de logique ici, faudrait pas juger avec nos yeux post-féministes non plus.

D.
 
Originally posted by Drakken
Je ne vois pas où est le manque de logique ici, faudrait pas juger avec nos yeux post-féministes non plus.

D.

Bien sûr. Mais le problème surtout vient, comme le disait encore Oexmelin, des personnages d'Isabelle de France et (dans une moindre mesure) de Béatrice d'Hirson : passer d'un caractère fort à une soumission béate, parce qu'on a fait coucouche avec un monsieur, ça va tout de même au-delà du problème social du XIVe siècle.

Pour le reste, je suis d'accord avec toi.
 
Originally posted by Drakken
N'est-ce pas logique au Moyen-âge?

Justement, je n'en suis pas si sûr. Il y a sans doute une marge entre des personnages de proto-féministes anachroniques, et d'autres, qui relèvent d'un bon vieux machisme d'après-guerre, ou qui se font en fait l'écho des vieilles barbes du Moyen Âge elles-mêmes.

En d'autres terme, je reproche à Druon, non pas d'avoir mis dans la bouche des Robert d'Artois et autres des insultes que l'on retrouve effectivement dans les écrits (d'hommes d'Église, pour la plupart) envers les femmes - mais plutôt d'avoir prêté à ses héroïnes un tel comportement. "Attitude d'hommes, même du XXe siècle, finalement digne de la muflerie d'Abélard ou de l'aveuglement de Jacques de Vitry." (R. Fossier). Pour le reste, SP l'a résumé.

Les femmes fortes n'avaient que les hommes comme modèle, mais elles se laissaient sûrement quand même aller à une féminité faiblarde qui leur avait été inculquée depuis l'enfance.

Féminité faiblarde ? Je ne sais pas: quand je lis Hildegarde de Bingen, cela ne m'apparaît pas faiblard. Différent, certes, comme le sont tous les comportements médiévaux. Ne peut-on concevoir une féminité médiévale forte ? Nos yeux post-féminisme ont à tout le moins l'avantage de ne pas balayer du revers de la main des comportements jugés autrefois comme historiquement incompatibles.

En bref, j'y vois, là encore, la marque d'un type bien marqué à diverses écoles traditionnelles, sur le rôle des femmes comme sur le rôle des rois. Ce qui n'enlève rien aux réelles qualités du roman, ou à l'incroyable interprétation du duo Jean Piat - actrice-qui-joue-Mahaut-d'Artois.
 
Originally posted by Oexmelin
En bref, j'y vois, là encore, la marque d'un type bien marqué à diverses écoles traditionnelles, sur le rôle des femmes comme sur le rôle des rois. Ce qui n'enlève rien aux réelles qualités du roman, ou à l'incroyable interprétation du duo Jean Piat - actrice-qui-joue-Mahaut-d'Artois.

Hélène Duc. Elle est encore vivante et joue dans Tanguy. :D

D.
 
Originally posted by Oexmelin
Féminité faiblarde ? Je ne sais pas: quand je lis Hildegarde de Bingen, cela ne m'apparaît pas faiblard. Différent, certes, comme le sont tous les comportements médiévaux. Ne peut-on concevoir une féminité médiévale forte ? Nos yeux post-féminisme ont à tout le moins l'avantage de ne pas balayer du revers de la main des comportements jugés autrefois comme historiquement incompatibles.

Par "faiblarde" j'entendais le modèle coucourde chez certaines femmes représentées par Druon dans son roman, comme Marie de Crécay justement. Non pas que la féminité de l'époque était "faiblarde". Il y a autant des féminités qu'il y a de femmes.

Je conteste simplement le fait que ce modèle de féminité, parce qu'elle nous déplait aujourd'hui, ne devait ipso facto certainement pas exister ainsi au Moyen-Âge. Des filles de prince nunuches dans une société nobiliaire patriarcale, il y en avait sûrement. Ou, à tout le moins, elle devait dissimuler une personalité plus forte pour des raisons pratiques, comme par exemple chez les dames des cours impériale et shogounale japonaises à la même époque.

Je me demande bien comment on peut représenter l'idéal-type d'une femme forte au Moyen-âge. As-tu des noms d'auteurs qui tentent d'en brosser un portrait historiquement valable?

D.
 
Originally posted by Drakken
Je conteste simplement le fait que ce modèle de féminité, parce qu'elle nous déplait aujourd'hui, ne devait ipso facto certainement pas exister ainsi au Moyen-Âge.

Alors nous sommes d'accord. Je ne conteste pas qu'il peut y avoir de ce genre de femmes. Je suis seulement mal à l'aise par la relative uniformité des comportements de femmes dans le roman de Druon, oscillant entre les archétypes: "la sorcière", "la putain", "la femme-homme", etc...

Je me demande bien comment on peut représenter l'idéal-type d'une femme forte au Moyen-âge. As-tu des noms d'auteurs qui tentent d'en brosser un portrait historiquement valable?

Non, malheureusement. Je ne suis pas, paradoxalement, un amateur de romans historiques. Et je sais qu'il y a la tentation que tu as présenté, de mettre en scène des proto-féministes se débatant dans un mode hostile, pour satisfaire la conscience des auteur/auteures (cf Maryse Rouy).
 
Originally posted by Drakken
Je me demande bien comment on peut représenter l'idéal-type d'une femme forte au Moyen-âge. As-tu des noms d'auteurs qui tentent d'en brosser un portrait historiquement valable?

D.

C'est un problème particulier dans la recherche actuelle, en tout cas en France.

Les sources pour se représenter la femme du Moyen-Age manquent singulièrement.
On ne peut s'appuyer très souvent que sur des données littéraires (le Roman de la Rose, les fabliauds) qui sont écrites par des clercs ordonnés (qui ont donc généralement un point de vue très particulier sur la question) ou ont un style qui reprend volontairement tous les grands poncifs (cas des fabliauds dits "érotiques").
Après, il y a la correspondance d'Héloise, les écrits de Christine de Pisan. Si je mets de côté le débat d'une arrière-garde qui pense encore que c'est Abélard lui-même qui écrivait les lettres de la première, on a à faire avec des personnalités exceptionnelles, et reconnues comme telles. Même chose pour Hildegard de Bingen et, pour les souveraines, avec Aliénor d'Aquitaine ou Blanche de Castille.
La littérature courtoise est également utilisable, mais vue que c'est elle qui a propagé l'essentiel des clichés, son utilisation est complexe : c'est par elle que les figures résumées par Oexmelin, la vierge blanche, la sorcière/putain, la souveraine dominatrice se sont propagées jusque dans les Rois maudits, je pense.

De temps en temps, quelques allusions dans des chroniques ou des documents juridiques, qui montrent parfois (j'ai des exemples dans la paysannerie, et les personnes de Mahaut, Aliénor montrent que cela pouvait se retrouver aux plus hauts niveaux) des femmes qui portent la culotte. Mais pour avoir vu de loin les travaux d'une acolyte dans ce domaine, aucune étude systématique sérieuse n'a encore été tentée, alors que c'est probablement là qu'il y a le plus de données.

En fait, je ne sais pas vraiment ce qu'il y a à chercher en fin de compte (comme si la féminité était quelque chose de descriptible), mais ce qui est évident (je l'ai bien ressenti lors de mon année de concours où la question de médiévale portait sur culture et société en Occident) c'est que les dernières présentations d'un personnage comme Christine de Pisan par exemple sont en effet sérieusement entâchées de féminisme moderne.
Mais c'est compréhensible : c'est justement parce que nous connaissons ce phénomène que le sujet revient dans la recherche.